On ne vous avait pas parlé de David Koch alias DeWalta depuis un moment et on a donc profité de la sortie de son nouvel album pour lui poser quelques questions.
Nos derniers échanges remontent à 2010 lorsque l’on avait publié ton podcast, peux tu nous raconter ce que tu as fait en 4 ans ?
C’est vrai que ça fait longtemps ! Beaucoup de choses sont arrivées à vrai dire, le plus important étant mon travail au studio, du lundi au vendredi, à faire ce que j’aime le plus, de la musique ! Les weekend j’ai continué à mixer pour le public, ce que j’aime tout autant. Donc dans l’ensemble, mes journées ont été chargées mais très enrichissantes. J’ai beaucoup de chance de faire ce que je fais et j’adore ça !
J’ai sorti des tracks sur Hello?Repeat, Meander, Cynorsure et surtout, mon premier album Wander sur Haunt en 2012. Cette étape a été cruciale pour moi.
De quelles sortie/morceau es-tu le plus fier ?
Hmm… Difficile à dire. J’ai créé ces tracks de différentes manières, et elles ne ressemblent pas, mais je ne pense pas être fier d’une en particulier. Habituellement c’est plutôt l’inverse, ça m‘arrive souvent d’être insatisfait d’un mix. A vrai dire, c’est plutôt rare que je sois fier d’une sortie, je suis quelqu’un d’assez exigeant et de très critique quand il s’agit de musique. Faire un maxi, c’est un peu comme laisser libre cours à quelque chose, s’ouvrir et s’abandonner. Souvent, en tant qu’artiste, nous sommes tellement investis et impliqués dans notre travail, qu’il devient difficile de lâcher cette part de nous, de notre travail. C’est dans ce sens là que mes deux albums, Wander en 2012 et Illumation en 2014, sont si importants à mes yeux.
Lorsqu’il s’agit du travail de studio, de la production en elle même, je suis de temps en temps content de les entendre forts dans un club. Si le système son est adéquat et de bonne qualité, là je peux être fier. C’est au regard de cette idée que la production du dernier Hello?Repeat « Semi Flying Objects » avec Claus Voigtmann sonne plutôt bien. Je pense avoir trouvé le bon équilibre pour ce mix.
Peux-tu nous en dire un peu plus sur Illumination ? Quels machines as tu utilisé ? Software/hardware ? Tes techniques de production ont elles évoluées ? Et aussi, combien de temps ça t’as pris pour le terminer ?
Illumination est mon deuxième album, et j’avais décider d’aller dans une autre direction que le premier, qui était très brute/organique, mixé avec des sonorités Jazz, des influences Hip-Hop Funk ou Detroit. Cet album était censé etre plus fonctionnel, plus direct, mais aussi plus conceptuel, plus raisonné si tu vois ce que je veux dire. Plus réfléchi dans un sens, moins grossier.
Je suis un véritable geek et suis complètement passionné par le matériel, l’outil musical, ce qui m’a poussé a développer et agrandir mon studio ces dernières années.
Donc mon dernier album est intrinsèquement lié à ma plus grosse passion et ma faiblesse : les synthétiseurs modulaires. La synthèse modulaire, différents EFX et processeurs comme des compresseurs, de la Tape ou la Tube Saturation et des boites à rythme analogiques sont assurément le cœur de cet EP.
J’utilise autant le software que le hardware, mais cet album est surtout rempli d’énergie analogique, ce que l’on ressent je pense. Au final, tout est dû à la manière dont tu utilises les sons qui sont déjà présents, peu importe qu’il soient issus du software, du hardware ou du « kitchen-ware ».
J’ai surtout utilisé des outils comme Phonogene (par exemple sur le track Illuminated), qui est à la base une pièce d’art et un instrument créé par un écrivain, compositeur et penseur français du milieu du 19ème : Pierre Schaeffer. Ses pensées avant-gardistes et ses projets sur l’art conceptuel de l’électronique avec la Musique Concrète m’inspirent énormément et particulièrement pour ce dernier album.
J’ai aussi beaucoup lu de littérature et des poèmes de Allen Ginsber. Son poème « Hurlement » (un classique), à l’instar d’autres de ses travaux, m’ont grandement inspiré. En plus de ma passion pour l’astronomie, la physique et les phénomènes qui nous dépassent, il fut ma plus grande inspiration pour cet album.
A propos de ton travail au studio, comment t’organises-tu ? C’est pas toujours facile de trouver l’inspiration…
Oui, ça peut être difficile d’être toujours inspiré. Personnellement, je trouve l’inspiration en dehors du monde de la musique. Ça peut être des livres, des films, la nature, le surf, la pluie, le soleil, la presse, les documentaires, des instruments bizarres, des outils, et dernièrement, les phénomènes physiques, la mécanique quantique, la philosophie, les trous noirs, la mécanique du cerveau… Quand j’ai entendu parler de l’effet d’interconnexion des astronautes, un état d’esprit dit particulier que seuls eux peuvent vivre en observant notre planète, cette lucidité sur l’importance de prendre du recul sur notre propre vie, j’ai été immédiatement inspiré ! Cette lucidité peut être si cruciale dans notre manière de voir le monde et d’appréhender notre futur. On retrouve ces notions et ces concepts dans d’anciennes pratiques de méditation, mais aussi dans les études scientifiques de la mécanique quantique. On peut faire beaucoup de parallèles avec nos vies. Sans vouloir trop rentrer dans le sujet, j’aime éduquer mon esprit. Il y a tellement de choses à explorer pour trouver l’inspiration.
En parlant de Claus, tu viens d’annoncer que le live que tu as posté dernièrement était ton dernier live solo. Etes-vous en train de monter un projet ensemble ?
J’ai arrêté de jouer des lives en solo car je n’étais pas heureux, pas satisfait dans cette idée de jouer ma musique tout le temps. J’avais besoin d’une interaction, de créer quelque chose de plus spécial quand il s’agit d’un live. Comme je mixe la plupart du temps et me considère comme un DJ, je me suis ennuyé à jouer live. En fait ça m’ennuie de jouer ma propre musique tout seul.
Comme j’ai beaucoup collaboré avec Mike Shannon ces dernières années et qu’on a sorti pas mal de tracks ensemble, on a finalement décidé de créer et présenter un projet live ensemble, sur scène.
Donc oui : notre nouveau live c’est DeWalta & Shannon live ! C’est beaucoup plus amusant pour tous les deux d’intérragir, de partager ensemble sur scène. Ça implique plus d’instruments et de machines que lorsqu’on est tout seul. On apporte énormément d’instruments. Enormément.
Sur scène on a deux synthés modulaires, des effets, des compresseurs, Ableton Push, trois séquenceurs, deux boites à rythme, un saxophone et plus encore.
Tu viens de rejoindre Solid-Am. Etais-tu dans une agence de booking avant ? Ça doit faire quelque chose d’être entouré d’artistes comme Fumiya Tanaka, Sonja Moonear, Thomas Melchior ou Steve O’Sullivan…
En effet, je suis et j’ai toujours été chanceux de pouvoir travailler avec des amis et des gens vrais autour de moi ! Et encore plus maintenant en intégrant SOLID. Bien sur j’avais déjà travaillé avec des agences auparavant, depuis ma première sortie sur Vakant il y a 6 ans. Mais SOLID acquiert un tout autre sens : c’est un retour à mes racines berlinoises. J’ai vécu 15 ans à Berlin, j’y ai fait mon lycée et une majeure partie de ma vie. Depuis que je sors, j’ai découvert et apprécié ces artistes là comme Sonja, Sammy, Fumiya, Zip et la bande de Hello?Repeat. Je connais Onur depuis Vakant et Binh ou Janina, qui sont aussi résident au Club Der Visionaere. C’est surtout Sonja, que je connais maintenant depuis longtemps grâce à Kalk Pets (label de ma première sortie) qui a été d’une grande inspiration et une très proche amie. Je l’adore ! Les gens attachés à cet agence, ou même l’entourage, sont de grands artistes, mais surtout les gens qui la tiennent sont des personnes de confiance, qui te veulent du bien. C’est un peu comme une famille. Je suis très heureux d’en faire partie. Cela fait sens dans mon dévelopement artistique, et dans ma vie.
Peux tu nous raconter quelques anecdotes de ta carrière et certains de tes meilleurs souvenirs qui te font rester toi même et ne pas devenir un produit comme beaucoup d’artistes aujourd’hui ?
Ahhh.. j’en ai de très drôles en tête mais je peux pas les raconter ici. Mais peut être que le truc le plus marrant qui me soit arrivé c’est certainement quand je voyageais avec Mike Shannon, on s’est retrouvé bloqué dans les embouteillages quelque part perdu en Croatie sur notre chemin vers l’aéroport. On regardait nos montres et on se disait qu’on aurait jamais notre avion à temps.. Quand les embouteillages étaient enfin finis, le conducteur s’est mis à dévaler la route à 230km/h, il espérait encore qu’on l’ait ! On arrive à l’aéroport, en fait juste un couloir, et je ne sais pas comment mais on a couru avec tout notre matos sans contrôle de sécurité, on a commencé à crier STOP STOP ON EST LA. Les pilotes ont arrêté l’avion et nous sommes montés. Un de nos amis était dans l’avion et avait fait en sorte de ralentir le décollage aussi. Voir les pilotes rire et nous montrer du doigt était plutôt rigolo ! Bref…
Faire son travail sans arrogance c’est essentiel. Même si tu lance une mode (ce qui n’est pas toujours une mauvaise chose sois dit en passant). C’est fondamental de rester honnête et vrai avec toi même. Mais tout le monde est différent. C’est important d’aimer ce que tu fais sinon ça ne sert à rien de le faire et il faut arrêter et trouver ce que tu aimes faire. Surtout dans le milieu de la musique, parce que sans cet amour, ça devient juste trop bizarre et faux.
Si la passion est authentique, le public le ressentira, et ca engendrera que des belles choses. C’est ça la beauté de notre métier, et c’est une des choses les plus belles que de faire ressentir des émotions aux gens !!
Je connais pas mal de différents artistes, issus du milieu jazz, ou classique, des artistes, des producteurs, des stars comme Seth Troxler. Ils sont tous différents, mais partagent l’amour et la même passion. Seth est génial, parce qu’il sait ce qu’il fait ! Si tu aimes ce que tu fais, tu es authentique.
L’authenticité avec un peu d’éducation, c’est important. Quand je vois des Dj d’EDM lancer des gateaux dans la foule ça ne semble pas être de l’authenticité, et ils n’ont pas l’air de savoir ce qu’ils font. Il n’y a rien de mauvais avec la pop culture, mais quand ça devient trop pauvre en musique, c’est juste triste. Et la limite est fine… J’adore le monde, excitant, inspirant, pas la version cheap des choses..
Avant que l’on se quitte, quels sont tes prochaines étapes ? La date de sortie d’Illumination ?
Illumation sort le 22 octobre, en deux parties, on sait jamais si quelqu’un ne veut que la moitié ! Avec mon collègue, il nous a fallu 9 heures de travail acharné pour créer la couverture. Mon collègue sur le label est la personne la plus gentille et la plus chaleureuse que je connaisse ! Il gère à peu près tout, et sans lui, pas grand chose ne fonctionnerait. Il est certainement mon ami le plus cher ! On est très satisfait du résultat, du son et de l’image, on a mis tous les deux beaucoup d’énergie et de passion dans chacun des tracks.
Les prochains objectifs ? Jouer, jouer, jouer, jouer, faire des remixes de DeWalta, produire de nouveaux morceaux pour des maxis que je prépare et pleins d’autres super projets de collaboration (encore secrète), et puis travailler sur un album à partir de mon projet de live avec Mike Shannon, et puis jouer encore ! Oh et est-ce que j’ai parlé de faire des tubes ?
En tout cas, merci beaucoup de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer ! Un grand merci pour votre soutien et votre intérêt.