Depuis maintenant 7 ans, Mathieu Berthet oeuvre analogiquement pour une liste presque interminable d’artistes (Carl Craig, Theo Parrish, Chez Damier, Baby Ford, Laurent Garnier, D’julz, Kenny Larkin…) et de labels de renoms (Logistic, Karat, Telegraph, Eklo, Salon Records…). Rencontre avec un humble passionné de musique et de vinyles.
En tant qu’ingé son mastering, peux-tu nous expliquer ta fonction et tes responsabilités ?
Je suis en contact avec les labels et différents artistes qui viennent au studio finaliser leurs morceaux. Ils finissent leur mix chez eux ou dans leur studio et ensuite, on corrige les erreurs s’il y en a dans leur mix et on optimise le son pour qu’il puisse être écouté partout dans de très bonnes conditions. On rend le morceau le plus « patate » possible.
Quand et comment es-tu arrivé dans ce domaine ?
J’avais un frangin (Fred NDLR) qui faisait partie des Troublemakers. J’ai toujours écouté de la musique, des vinyles, et un jour j’ai pu rencontrer leur ingé son en tournée qui m’a expliqué que ce métier que je ne connaissait pas existait.
École de la débrouille ou école spécialisée ?
J’ai fait la SAE, une école d’ingé son à Paris il y a 10 ans et à partir de ça j’ai travaillé pour VPI qui était un presseur de disques. Lorsque VPI a fait faillite, j’ai pu racheter le studio. Je le connaissais très bien, j’avais l’habitude de ce métier, j’aimais ça et je me suis dit allez j’y vais, je me lance.
Comment te tiens-tu au courant des dernières avancées dans ton travail ?
J’ai pas mal d’amis disquaires et je vais souvent les voir. Je leur dit « tiens, donne moi un disque qui t’a sauté aux oreilles cette semaine » et après je les écoute dans mon studio pour savoir ce qui se passe, qui fait quoi, les niveaux d’enregistrements…
D’ailleurs, ton métier a-t-il évolué depuis tes débuts ?
Oui, ça évolue dans le sens ou les supports ont changés. Beatport est devenu le leader et quand quelqu’un achète des morceaux et qu’il en écoute 50 à la suite, si jamais le track que t’a bossé n’a pas le niveau minimum, malheureusement il peut passer à la trappe. Pour la gravure vinyle aussi ça a pas mal évolué car depuis 4-5 ans il y a un retour aux machines. Aujourd’hui j’arrive à faire des gravures vinyles vraiment magnifiques. Elles sont fortes, brillantes, claires, sans distorsion, principalement parce que les morceaux s’y prêtent.
Ton meilleur souvenir ou le boulot qui t’a rendu le plus fier ?
Quand il y a du feedback, des retours de gros artistes ou des types qui me contactent pour me dire « le travail sur ce disque là à été super ». Je me souviens, quand j’étais gamin, je mixais dans ma chambre, il y avait des artistes que j’adorais et aujourd’hui je travaille avec eux. Ça j’en suis fier.
Et ta pire expérience ?
Ne pas être compris par mes clients. Ça m’est déjà arrivé de discuter avec certains, il y avait un souci, je ne comprenais pas ce qu’ils me disaient et eux ne comprenaient pas ce que je leur disais. Heureusement ça arrive rarement.
Une fourchette de tes revenus mensuels ?
J’arrive à vivre à Paris.
Quels sont tes collègues/concurrents dont tu admires les compétences ?
Majoritairement, c’est les artistes qui me font halluciner. Aujourd’hui il y en a vraiment qui arrivent à avoir un super son, qui réfléchissent, se prennent la tête et arrivent à créer quelque chose.
Bosser dedans, ça n’enlève pas un peu la magie ?
Je suis quelqu’un de très émotif avec la musique. Je fait un métier formidable que j’adore donc non, je ne suis pas du tout blasé.
Ton conseil à ceux qui aimeraient se lancer dans la profession ?
Le plus important pour moi c’est d’avoir une très bonne paire de haut parleurs, donc des enceintes qui valent relativement cher car elles ont un rendu dans le bas et une fidélité au son pouvant être incroyable. Il faut faire des stages en studios, ne pas hésiter à être curieux. Après il faut avoir une bonne culture de la musique, avoir l’habitude d’écouter et analyser les disques, s’entrainer et pratiquer. Aujourd’hui, on peut bosser chez soi avec un petit ordinateur, trouver des informations sur des forums, mais c’est bien d’avoir une base théorique, comprendre pourquoi un compresseur compresse, pourquoi des enceintes donnent du stéréo, pourquoi le son bouge dans l’air…
Article rédigé pour Trax Magazine en 2011 (dates mises à jour).