Décrit comme un « activiste de la techno » sur un flyer du Berghain, Freddy K fait partie de ces vénérables anciens de la techno. Un héros de la scène de Rome où il a pu tenir différentes casquettes, de l’animateur d’émission de radio au vendeur de disques. Aujourd’hui, il réside à Berlin où il a pu être résident des fameuses soirées Homopatik, et où il a développé son agence de management pour différents labels. Meilleur ami de Max_M, c’est avec celui-ci qu’il a développé la plupart de ses projets avant sa disparition tragique en 2015 suite à un cancer. Nous avons pu poser quelques questions à ce passionné entre deux dates à Concrete et au Berghain, et il en profité pour nous filer un mix bien évidemment techno qu’on vous invite à découvrir.

Tu as fait quoi ces derniers temps ?

Plus ou moins la même chose que d’habitude. Souvent je joue quelque part pendant le weekend, récemment Paris, Tel Aviv, Rome, Amsterdam. Bien entendu j’apprécie notre froid été ici à Berlin, entre les clubs et du temps libre avec ma copine.

De ce que j’ai compris, tu tenais une émission de radio très connue pendant les années 90 en Italie. Tu peux me parler un peu de Virus ?

Oui, au début des années 90 Rome possédait ce gros mouvement techno. Chaque weekend on pouvait y voir des soirées avec 3/4000 personnes et beaucoup de clubs où l’on jouait de la techno. À cette époque on pouvait déjà danser sur la musique des artistes les plus connus d’aujourd’hui, comme Aphex Twin, Speedy J, Richie Hawtin, Underground Resistance, Frank De Wulf, Joey Beltram… Aussi grâce à la grosse scène de Rome avec Lory D, Leo Anibaldi, Andrea Benedetti, Luca Cucchetti et bien d’autres. Tout tournait autour d’une émission nommée “Mad Show” sur une radio locale et du disquaire historique « Remix ». J’ai grandi dans cette atmosphère, j’étais un raver, et donc j’achetais des vinyles, j’écoutais la radio et bien entendu je sortais pour danser presque chaque weekend… Ce sont les raisons pour lesquelles je suis devenu DJ. J’ai commencé à jouer dans des clubs autour de 1991-92, et j’ai reçu pas mal de retours positifs, et un jour il est devenu impossible d’écouter de la techno à la radio. Il me manquait quelque chose, et j’en avais besoin.
C’est à ce moment que j’ai reçu une offre d’une radio qui jouait plutôt de la musique folklorique. J’ai commencé à jour pour eux le 24 avril 1993, aucune promotion, un test en fait. Les échos ont tout de suite été excellents, c’était une bonne idée et quelque chose qui manquait aux gens qui avaient faim de techno. J’ai toujours pris des risques (même si ce n’est pas toujours une bonne chose) et j’ai commencé l’émission Virus, du lundi au samedi, de 20h à minuit, ainsi que parfois le samedi toute la nuit en direct. C’était génial de jouer de la techno, de parler des artistes et labels. J’ai dû faire beaucoup de sacrifices au début, parce que je devais payer mon loyer avec la radio, et que je le payais avec mes économies et l’argent des dates.
Mais grâce à l’émission, depuis ce jour pendant 7 ans, un gros mouvement à Rome a commencé sous le nom de Virus. Ce n’était pas juste une émission, c’était l’élément vital de beaucoup d’amoureux de la techno et c’était incroyable. La communication est très importante pour créer un mouvement ou un réseau, et la radio FM était géniale pour cela. Aujourd’hui avec les nouvelles technologies, les podcasts, tout est un peu froid et confus.

C’est grâce à la radio que tu as commencé à collaborer avec ACV ?

Exactement, je jouais beaucoup et bien entendu ils ont commencé à s’intéresser à ce qu’il se passait à Rome avec cette nouvelle génération. ACV a été un label très important dans l’histoire de la techno avec des gens comme Robert Armani, Leo Anibaldi… Grâce à ACV j’ai commencé à produire. Ils m’ont invité dans leurs studios avec des techniciens et les meilleurs équipements de l’époque, ils étaient vraiment professionnels. Mon premier disque Control est sorti en 1994, grâce à l’aide du projet 303. En 1995 mon premier album Rage of Age a été chart par des grands et a reçu de très bonnes reviews. J’ai ainsi pu commencer à jouer un peu partout dans le monde, en Suisse, en France, Russie…
 
Aujourd’hui tu es à la tête d’une agence à Berlin et tu as ton propre label, comment as-tu effectué la transition ?

C’est simple, je suis toujours ma passion et mon rêve de vivre avec la techno. Bien entendu être juste un DJ n’a pas toujours été facile et on doit créer quelque chose de parallèle, où l’on peut utiliser sa passion et son expérience pour construire quelque chose. J’ai tenu Virus Records, un disquaire à Rome nommé , avant de commencer à travailler dans un autre magasin, j’ai pris quelques risques et commencé à m’occuper de distribution mais à un moment avec l’invasion digitale, j’en ai eu assez de bosser pour des disquaires. C’était froid (surtout en Italie), et les ventes étaient devenues mauvaises. Ça me rendrait triste, fou même. C’est alors que j’ai commencé K1971, une agence de management pour les labels avec un concept qui fonctionne encore aujourd’hui. Après êtres parti vivre )à Berlin, j’ai travaillé avec 712 pour la distribution et fondé Unbroken Booking. Je pense que la meilleure définition est celle que le Berghain a écrit sur son flyer lorsque j’ai joué pour la première fois dans le club : « Un activiste de la techno. » Je fais toujours quelque chose en lien avec ce que j’aime, la techno !


 
Comment tu gères ton temps avec toutes ces activités ?

C’est facile, peut-être pas toujours, mais cela pourrait… Lorsqu’on aime ce que l’on fait. Bien entendu après la perte de Max_M (mon meilleur ami et partenaire dans toutes ces activités) c’était dur. Mais du négatif on doit trouver la motivation d’être plus fort et de ne pas s’arrêter. Aujourd’hui d’autres gens sont impliqués et je peux dédier plus de temps au djing. Au final c’est la raison pour laquelle je suis dans la techno depuis les années 90.

Est-ce que tu fais de la musique en ce moment ?

Je recommence, bien entendu je ne suis pas un producteur à plein temps et je vais donc préparer mes nouveaux trucs avec l’aide d’un bon ingénieur du son. Tu sais le goût du DJ (et du raver que je suis haha) avec la connaissance d’un ingénieur du son… Je pense que c’est la meilleure façon de produire quelque chose de bon.

Tu viens de jouer à Concrete, c’était ta première fois ? Qu’en-as-tu pensé ?

C’était ma première fois et c’était génial ! La vibe est excellente et j’ai été impressionné par le professionnalisme et la passion du crew, wow !! C’est quelque chose que beaucoup de promoteurs doivent apprendre avant de pouvoir dire « je suis promoteur ». C’était aussi un plaisir de quitter le booth du DJ et de le donner à Ben Klock aux alentours de 138 BPM avec une grosse énergie. Il m’a dit avoir beaucoup apprécié et il a continué avec presque le même BPM, pas moins de 135, le résultat fut une soirée fantastique.
  
Pour finir, est-ce que tu avais quelque chose en tête lorsque tu as commencé à enregistrer le mix ?

Honnêtement rien de spécifique, j’aime bien vivre dans l’instant. J’ai donc joué des vinyles qui m’inspiraient ce jour là, rien de plus. La beauté de la techno est d’être simple et véritable, mais en même temps elle peut être une bande son du moment que l’on vit.

Tu vas faire quoi dans les prochains mois ?

La semaine prochaine je vais jouer « à la maison », l’endroit que j’aime le plus, le Berghain. Lorsque je peux, je passe tellement d’heures là-bas et jouer le set de fin l’année dernière fut un des meilleurs moments de ma vie, inoubliable. Je prépare aussi des trucs, un nouveau maxi va sortir, et un morceau pour une compilation qui compte beaucoup pour moi, mais je ne peux en dire plus pour le moment.
Sinon mon petit bébé, le label Key Vinyl va sortir un disque de PVS, et le prochain sera signé Héctor Oaks, il y aura aussi un autre disque d’ici la fin de l’année.